Henri Martin : une œuvre de jeunesse puissante
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Le musée des Augustins est sur le point d’accrocher à ses cimaises une œuvre acquise en 2024 intitulé « La Course à l’abîme« . Ce tableau est une découverte majeure pour comprendre les premières ambitions de son auteur le peintre toulousain Henri Martin (Toulouse, 1860 – Labastide-du-Vert, 1943).

Henri Martin est un artiste peintre né à Toulouse en 1860. Formé à l’école des Beaux-Arts de Toulouse de 1877 à 1879 dans l’atelier de Jules Garipuy, il gagne Paris en 1879 muni d’une bourse municipale. Il devient l’élève de Jean-Paul Laurens, l’un des artistes méridionaux les plus célèbres de son époque.
Le 16 août 1881, c’est à Toulouse qu’il épouse Marie Charlotte Barbaroux, pastelliste rencontrée à l’école des Beaux-Arts de sa ville natale. L’année suivante, il peint le tableau intitulé « La Course à l’abîme » (lire la notice de l’œuvre). Et en 1882, Henri Martin est un jeune artiste encore en devenir. D’ailleurs on reconnait un autoportrait de l’artiste, alors âgé de 22 ans, dans le personnage masculin qui se tient debout au cœur de la tourmente.

« La Course à l’abîme » est une illustration extravagante, très baudelairienne, des errements et des ambitions d’un jeune artiste déraciné qui cherche sa voie.
Avec cette course folle mêlant hommes, femmes et animaux, corps tendus ou lascifs, jeune garçon tempétueux et gorgone en furie, Henri Martin réalise un troublant exercice d’introspection tout en livrant une version personnelle du pandemonium, lieu de confusion et de décadence, d’après le nom donné à la capitale de l’Enfer.
Fervent lecteur de Poe, Dante, Byron, Baudelaire et Verlaine, Henri Martin puise aux mêmes sources littéraires que les artistes romantiques puis symbolistes. Il met au service de cette vision infernale un métier solide, reflet de ses années d’enseignement académique.

« La Course à l’abîme », 1882
Tout est loin d’être dit nous rappelle Laure Dalon directrice du musée des Augustins
… Pourtant, et l’on comprend en observant la partie droite du tableau qu’il reprend cette toile des années après sa réalisation, les touches de couleur pure appliquées en arrière-plan correspondent au style singulier qui a fait sa célébrité. Cette étonnante « Course à l’abîme » n’en est que plus spectaculaire et intéressante, révélant peut-être les premières expériences divisionnistes d’Henri Martin. C’est en 1885, à la suite d’un voyage fondateur en Italie, qu’il s’éloigne des modèles académiques, adopte une palette plus lumineuse et, influencé par les expériences néo-impressionnistes, commence à construire les formes et la lumière par touches courtes, séparées et parallèles.

Henri Martin gardera toute sa vie cette grande toile ambitieuse et intime, tonitruante et poétique, qui nous livre de lui une image inédite, intrigante et profondément émouvante.
Henri Martin s’éteindra durant l’automne 1943 à Labastide-du-Vert dans son domaine de Marquayrol son Giverny lotois.